Danielle DIMONO, la camerounaise qui performe dans l’industrie nucléaire française

Danielle DIMONO : de Douala au nucléaire

Comment s’est-elle retrouvée au cœur de la supply chain nucléaire ? Quels défis a-t-elle dû surmonter pour se faire une place dans un univers où les femmes représentent moins d’un quart des effectifs ? Focus !

Elle a grandi avec une conviction : ne jamais quémander sa place, mais l’imposer par le travail et la confiance en soi. Partie du Cameroun après son baccalauréat, Danielle DIMONO occupe aujourd’hui le poste de Senior Nuclear Projects Buyer dans l’un des secteurs les plus exigeants au monde : le nucléaire.

Son quotidien ? Négocier, sécuriser et coordonner l’approvisionnement en composants stratégiques pour les centrales, en France comme à l’international.

Rencontre avec une femme dont le parcours est la preuve qu’un rêve peut traverser les océans, survivre aux doutes et s’imposer là où on ne l’attendait pas.


Bonjour Danielle. Pour commencer : que faut-il savoir de vous et de votre parcours ?

Je suis une jeune femme, d’origine camerounaise, née et grandie à Douala, cette ville où les rêves naissent souvent en silence, mais avec une intensité profonde. Je suis mariée depuis 2019 et maman d’un magnifique petit garçon de trois ans.

Mon parcours scolaire a débuté au Collège Privé Lauréat de Bonamoussadi, où j’ai obtenu mon baccalauréat. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de quitter mon pays natal pour poursuivre mes études à l’étranger, avec en tête, un rêve que je n’osais pas encore nommer.

Après une première étape au Maroc, j’ai poursuivi mes études et obtenu une maîtrise (Master 1) en administration et gestion des entreprises à l’IAE de Perpignan en France.

En cours d’année de Master 2 (juste avant les soutenances), j’ai ressenti le besoin de me réorienter, d’emprunter un chemin qui me ressemblait davantage : celui de la supply chain, et plus particulièrement des achats.

Cette décision n’était pas un saut dans l’inconnu : j’étais déjà titulaire d’un DEES (Diplôme Européen d’Études Supérieures) en Logistique et Transport obtenu à la Sherbrooke Academy de Casablanca, au Maroc.

Je me suis donc inscrite en Master Achats de l’ISCID-CO, école de commerce rattachée à l’Université du Littoral Côte d’Opale (ULCO). C’est au cours de ce cursus que s’est ouverte à moi une porte que je n’aurais jamais imaginé franchir : celle du secteur nucléaire.

Tout a commencé en 2018, lors d’un stage de Master 1 au sein d’une entreprise française, leader mondial dans la fabrication des composants pour les centrales nucléaires.

Ce stage s’est transformé en alternance pour ma deuxième année de master, puis en poste à temps plein en tant qu’Acheteuse sous-traitance pour la fabrication de pièces mécaniques et de chaudronnerie destinées à des projets internationaux du nouveau nucléaire, notamment la centrale Hinkley Point C (HPC) en Angleterre.

Après trois années d’expérience sur ce poste, j’ai exprimé le souhait d’évoluer davantage. Une mutation m’a été accordée pour rejoindre la maison mère du groupe, un acteur majeur de l’énergie en France, où j’évolue aujourd’hui en tant que Senior Nuclear Projects Buyer, au service du parc nucléaire français en exploitation.

Ce parcours, tissé entre plusieurs continents, n’a rien d’un hasard. Il est le fruit d’un engagement constant, d’une soif d’apprendre et d’un amour profond pour les métiers complexes qui bâtissent l’avenir.


‘’
Mon parcours ne doit rien au hasard. Il est le fruit d’un engagement constant et d’un amour profond pour les métiers complexes



Qu’est-ce qui vous a motivée à vous engager dans ce domaine ?

J’ai grandi avec le soleil de l’Afrique sur la peau et ses étoiles pleines les yeux. Très tôt, j’ai compris que la lumière ne vient pas toujours du ciel, parfois, elle se cherche, se construit, se maîtrise. La science est vite devenue ma boussole, et l’énergie, mon étoile polaire.

Choisir le nucléaire, ce n’était pas suivre une voie toute tracée, mais plutôt emprunter un sentier escarpé, peu fréquenté par les femmes, encore moins par celles qui, comme moi, portent le Cameroun dans leurs racines.

Mais j’ai appris qu’on ne demande pas sa place dans les domaines techniques, on la prend, avec rigueur, avec passion, et surtout avec foi.

Depuis mon jeune âge, j’ai toujours été fascinée par la science et la technologie. Même si je suis une grande passionnée de philosophie. En grandissant, je rêvais de contribuer à des solutions concrètes pour répondre aux grands défis énergétiques.

Le secteur du nucléaire s’est imposé à moi comme une voie d’excellence, alliant innovation, rigueur scientifique et impact réel sur le monde.

Le fait que les femmes soient encore peu nombreuses dans ce domaine ne m’a pas découragée, bien au contraire : cela m’a poussée à me dépasser, pour montrer que notre place est aussi là, dans ces métiers exigeants et porteurs d’avenir.

C’est la conviction que l’on peut être une femme, issue d’un continent vibrant, et faire rayonner l’intelligence et la précision là où on ne nous attend pas.

Aujourd’hui les femmes sont de plus en plus présentes dans ce secteur et c’est rassurant. L’avenir se construira dans la diversité.


Concrètement, en quoi consiste votre travail aujourd’hui ? Quelle est votre mission au sein de l’entreprise où vous exercez ?

Je travaille dans les entrailles silencieuses de l’énergie nucléaire, là où se joue un équilibre délicat entre puissance et prudence.

Ma mission ? Être le point d’entrée pour certains Marchés et contrats d’approvisionnement des gros composants en lien avec les projets de maintenance et de construction des centrales nucléaires françaises ou à l’international.

Chaque jour, j’analyse, j’évalue, je négocie. Je veille à ce que tout se fasse dans la rigueur, la sécurité, l’éthique et la sureté, car dans ce domaine, la moindre faille peut être un séisme.

Je suis à la croisée de l’ingénierie et de la supply chain. Mon métier n’est pas spectaculaire, mais il est vital comme les racines d’un arbre que l’on ne voit pas, mais sans lesquelles rien ne pousse.



Lire aussi : « Le cliché du contrôleur financier “policier” a la vie dure » Alexandra MONTHE



Qu’est-ce qui vous passionne le plus dans ce que vous faites au quotidien ? Ce qui vous fait vibrer, vraiment ?

Ce qui me fait vibrer, c’est de savoir que mon travail a du sens. Je ne contribue pas simplement à la construction de l’avenir énergétique.

Je suis à la croisée des chemins entre le rêve et la réalité. En quittant le Cameroun, je portais en moi un espoir flou, sans savoir qu’il deviendrait un jour ma trajectoire.

J’aime les défis techniques. Mais plus encore, j’aime me dire que je suis peut-être, pour une jeune fille quelque part à Douala, à Yaoundé, à Eséka, à Bafoussam ou à Garoua, la preuve vivante que les rêves ne sont pas réservés à un autre monde.

Je suis une femme qui croit qu’avec du savoir, du courage et de l’amour pour son métier, on peut illuminer bien plus que des villes : on peut allumer des vocations.

Si vous deviez vous décrire en quatre mots – les premiers qui vous viennent, sans trop réfléchir – que diriez-vous ?

Je dirai ce que les autres disent souvent de moi : Intelligente ; Assertive ; Persévérante ; Généreuse



‘’

Personne ne vous offrira votre place. Mais si vous avancez avec confiance, avec le travail, vous la créerez vous-même



À votre avis, quelles sont les qualités qui vous ont permis de faire votre place dans l’industrie nucléaire ?

Je dirais que c’est un mélange de patience et d’obstination. J’ai appris à ne pas chercher la lumière trop vite, mais à grandir avec méthode, avec foi et dans la discipline.

Il m’a fallu de la rigueur, bien sûr, cette rigueur silencieuse qui ne se voit pas mais qui soutient tout. Il m’a fallu de l’audace aussi, pour oser entrer dans des salles de réunion ou personne ne me ressemblait et faire entendre ma voix. Et surtout, il m’a fallu croire en ma légitimité.

Ce sont ces qualités, forgées entre les silences du doute et la voix intérieure du rêve, qui m’ont permis de tenir bon et de faire ma place avec solidité.

Depuis votre départ pour la France, quel lien conservez-vous avec le Cameroun ?

Le Cameroun ne m’a jamais totalement quittée. C’est le sol d’où je viens, et même si aujourd’hui je vis loin, mes racines y sont profondément ancrées.

Je garde un lien vivant avec mon pays. À travers ma famille bien sûr, les projets que je promeus de loin. Je reste attentive à l’évolution du pays, à ses talents, à ses combats.

Et chaque fois que je parle de mon parcours, que je prends la parole, c’est aussi le Cameroun que je fais entendre. Je suis partie, oui mais jamais déracinée.

J’ai grandi dans un quartier ou nous avions un baobab et j’ai eu la chance de voir ce que c’est que d’avoir des racines solides : la tête tournée vers le monde, les racines solidement ancrées dans la terre rouge de mon enfance.

Quand vous regardez le chemin parcouru, quel message auriez-vous envie de transmettre à d’autres jeunes femmes tentées par des voies non conventionnelles comme la vôtre ?

Je leur dirais : osez. Même quand le chemin semble semé d’embûches, même quand le monde vous dit tout bas que ce n’est pas pour vous. Osez rêver grand, osez échouer, osez recommencer.

Personne ne vous offrira votre place. Mais si vous avancez avec confiance, avec le travail, dans l’intégrité, vous la créerez vous-même. Et vous découvrirez que les portes qui semblaient fermées n’étaient peut-être qu’entrebâillées.

Je suis la preuve qu’un rêve né dans un coin de Douala ou de Yaoundé peut traverser les océans, survivre aux doutes, et prendre forme là où on l’attend le moins.

À toutes celles qui hésitent encore, je dis : vous avez le droit d’écrire une histoire nouvelle. Une histoire à votre image forte, complexe, et belle.

Une dernière chose il y’a une forme de magie dans la conquête des voies complexes ; un plaisir infini quand l’esprit comprend enfin ce qui semblait compliqué ou inespéré, là où le monde et le cœur nous disent : tu n’y arriveras pas. Et une lumière s’allume pour ne plus jamais s’éteindre.

Votre Intelligence est votre force on nait tous avec une intelligence vierge, nourrissez la en allant à l’école, faites les études et allez au bout de ce que vous pouvez donner, même quand la route semble obscure, cherchez l’étincelle qui vous permettra d’illuminer votre chemin, mais surtout n’empruntez pas de raccourcis.

Partager l’article

Share on facebook
Share on twitter
Share on linkedin
Share on whatsapp
fr_FRFrench

Newsletter

Nous contacter

Remplissez les informations suivantes et soumettez le formulaire. Nous vous répondrons dès que possible.

Devenir contributeur

Remplissez les informations suivantes et soumettez le formulaire. Nous vous répondrons dès que possible.

Proposer un article

Remplissez les informations suivantes et soumettez le formulaire. Nous vous répondrons dès que possible.

Proposition de partenariat

Remplissez les informations suivantes et soumettez le formulaire. Nous vous répondrons dès que possible.

Acheter nos bannières

Remplissez les informations suivantes et soumettez le formulaire. Nous vous répondrons dès que possible.